Comment Jaguar, cador de la Formule E imagine ses voitures électriques du futur


Au sortir de sa meilleure saison en Formule E, Jaguar arrive à un moment charnière de son histoire, celui de son passage au 100 % électrique. Entre la division sport et la branche classique de la marque, les intérêts n’ont jamais semblé aussi liés.

Jaguar, marque iconique de l’automobile s’il en est, nage en plein paradoxe. L’écurie de Formula E frappée du blason au félin bondissant sort de sa meilleure saison. Le seul sport auto dans lequel Jaguar est présent donne donc satisfaction. À l’opposé, sa branche commerciale traditionnelle est en fin de cycle, en difficulté financière et attend de lancer un nouveau volet de son histoire. Ce croisement des courbes n’a pas échappé aux décideurs de la marque détenue par le groupe Tata qui ont lancé, en 2021, un nouveau plan stratégique sobrement nommé « Reimagine ». Dans cette vision particulièrement ambitieuse, Jaguar opte pour deux changements considérables :

  • Devenir un constructeur 100 % électrique avant 2030.
  • Produire des véhicules encore plus premium et viser un marché encore plus exclusif.

Ce virage, Jaguar ne compte pas le faire sans l’expertise acquise dans le sport automobile électrique. Au contraire, tous les indices sur les futures modèles de la marque semblent indiquer que de nombreuses technologies issues de la Formula E seront adaptées au prochain véhicule commercial du Britannique. Afin de nous donner un aperçu de ses projets et de son savoir-faire spécifique à l’électrique, Jaguar nous a donné rendez-vous chez lui, dans son nouveau centre de Kidlington au nord d’Oxford, un endroit dédié à la performance, au développement des futures Formule E du constructeur, mais aussi le nouveau point de départ des Jaguar électriques qui vont sillonner nos routes.

Jaguar Tcs Racing 2
© Jaguar

Ce que la Formula E va apporter aux futures Jaguar

« En formule 1, tout est question d’aéro. En Formule E, tout est question de logiciel ». Cette formule ciselée est l’œuvre de James Barclay, le directeur de l’écurie Jaguar TCS Racing, et de la division sport auto du groupe Jaguar Land Rover par extension. Elle dit à la fois tout de la complexité d’avoir des performances en Formula E et de l’intérêt de les convertir dans des véhicules électriques grand public.

En effet, dans la version électrique de la Formule 1, la liberté accordée aux constructeurs pour développer leur bolide est bien moindre. Les dimensions des voitures, leur train avant et leur batterie sont prédéfinies dans le règlement annuel et communs à tous les participants. Les écuries, elles, ne peuvent modifier que trois parties de la voiture, en dehors du réglage des suspensions :

  • Le switch permettant de passer du courant continu au courant alternatif.
  • Le moteur.
  • La boîte de vitesses.

Ce champ d’action limité, ainsi que le fait de courir avec la même batterie que ses concurrents, oblige naturellement les écuries à valoriser la partie software et optimiser au mieux l’impact de chaque composant propriétaire sur le bloc batterie.

C’est sur cet aspect en particulier que se distinguent les meilleures écuries, l’objectif ultime en Formule E étant l’efficience et la capacité à aller chercher de la régénération d’énergie tout en flirtant avec la vitesse maximale autorisée. Et à ce jeu, les écuries les plus performantes, dont Jaguar donc, parviennent à récupérer jusqu’à 50 % de l’énergie qu’elles consomment. L’élément le plus important que la nouvelle génération de Jaguar électrique pourrait emprunter à la Formule E se situerait donc du côté de la gestion de la batterie. De fait, il est question d’une autonomie de 700 km et celle-ci ne serait pas uniquement imputable à la taille de l’accumulateur…

Sur sa Formule E actuelle, Jaguar est particulièrement efficace en matière d’efficience, une performance qu’il doit en partie à ses partenaires. En effet, le team racing britannique travaille avec TCS pour la partie analyse de données, mais surtout avec Wolfspeed sur la partie switch AC/DC et DOW, une société américaine spécialisée dans la chimie. Cette dernière a d’ailleurs mis au point un alliage particulier qui vient épouser la fibre de carbone du châssis pour améliorer la dissipation de la chaleur. Pareille technologie aurait évidemment du sens si elle était appliquée à la voiture électrique de tous les jours, mais elle est bien évidemment trop coûteuse. Cela rappelle d’ailleurs que Jaguar a été le premier constructeur auto à proposer une voiture de course tout carbone. C’était au Mans en 1988, avec une victoire au bout.

Jaguar Tcs Racing 3
© Jaguar

C’est en cela que la nouvelle stratégie de Jaguar est pertinente. Après des années passées à chasser sur les terres de Mercedes, BMW et Audi, avec un succès mitigé, la marque sportive britannique va viser un segment encore plus premium, celui des véhicules ultra-luxueux. Ainsi, ce type de technologies qui portent leur fruit en Formule E et qui seraient trop chères pour une « simple voiture premium » pourraient être rentabilisées dans le cadre d’une supercar de luxe, par exemple.

Un premier modèle très sportif qui se dessine

C’est donc tout sauf une surprise si le premier modèle de cette nouvelle ère pour Jaguar sera un coupé GT 4 portes. Dévoilée au printemps dernier, la première esquisse de cette sportive aura assurément des lignes très originales, mais aussi des caractéristiques techniques ambitieuses. D’ailleurs, le constructeur n’a pas pas hésité à proclamer que son futur modèle développera plus de puissance que n’importe quelle Jaguar jamais produite (au-delà des 600 ch).

Nous en savons finalement très peu sur ce modèle dont la présentation officielle est prévue fin 2024 pour une commercialisation en 2025, si ce n’est qu’il s’appuiera sur une plateforme intégralement nouvelle et pensée pour l’électrique, la JEA. Assemblé dans l’usine historique de Solihull au Royaume-Uni, ce coupé GT devrait démarrer à plus de 120 000 euros. À ce niveau de prix, il sera donc intéressant de regarder quels éléments techniques ont été empruntés à la Formule E. Comme évoqué plus avant, l’autonomie estimée, elle, serait de 700 km, ce qui offrirait un combo puissance autonomie assez rare sur le marché. Sur ce point précis, il semble probable que le coupé GT 4 portes dispose d’un système de récupération d’énergie maison.

Ce qui semble également acquis, c’est que cette GT 4 portes sera la première d’un trio électrique composé de deux autres modèles très différents. Ce sont ces trois-là qui devraient incarner la nouvelle identité de Jaguar pour les années à venir. Exit donc l’I-Pace, l’un des premiers SUV électriques du marché, assez injustement snobé au demeurant, pour une nouvelle génération d’électriques censées réincarner le passé sportif glorieux de Jaguar. Tout en assumant pleinement son passage à l’électrique, le constructeur mythique entend bien rappeler au monde automobile son ADN de grand sportif. Après tout, on ne gagne pas sept fois Le Mans par hasard.



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